Les musulmans s’apprêtent à accueillir un grand bienfait de Dieu ; un bienfait qui n’est pas réservé à un individu ou à une catégorie de gens ; un bienfait qui comble annuellement l’ensemble de la communauté « oumma ». Bienheureux est celui qui accueille ce bienfait comme il se doit. Il s’agit du bienfait de Ramadan.
Le mois de Ramadan a une place particulière en islam. Il ne s’agit pas d’un mois ordinaire qui commence pour finir … Son jeûne constitue l’un des piliers sur lesquels s’élève l’édifice de l’islam. Al-Boukhari et Mouslim rapportent d’après ‘Abdoullah ibn ‘Omar, que Dieu l’agrée, que le Prophète, que la Paix et la Bénédiction de Dieu soient sur lui, dit : « Les fondements de l’islam sont au nombre de cinq : L’attestation qu’il n’est de dieu que Dieu et que Mohammad est le Messager de Dieu, l’accomplissement de la Prière, l’acquittement de la zakat, le Pèlerinage à la Maison sacrée et le jeûne du mois de Ramadan ».
Le jeûne fait partie des actes cultuels qui ont le plus d’impact sur la purification spirituelle et la sublimité des âmes.
Le jeûne contribue à renforcer la volonté, à contenir les passions et l’amour excessif de soi. Il donne la force au jeûneur de délaisser ce qui lui est nuisible, et même ce qui est ordinairement licite. Le jeûneur est alors doté d’une volonté forte qui se traduit par la patience face à l’illicite et l’enthousiasme dans l’acquittement des devoirs.
Le jeûne est une école d’éducation morale et spirituelle dans la mesure où il développe des vertus que sont la véracité dans la parole ainsi que la sincérité, le sérieux et la rigueur dans l’action. Il apprend à l’être humain comment se détacher des aspects de son animalité dont le seul objectif est de manger, de boire et d’assouvir ses instincts les plus bas.
Le jeûne nous offre plusieurs bienfaits dont :
1- Le bon comportement avec autrui : Nombreux sont ceux qui ne comprennent pas la réalité du jeûne. Pour eux, le jeûne se limite à l’abstinence alimentaire et sexuelle. Ils sont, pendant le mois du Ramadan, dans le même état dans lequel ils sont durant les autres mois. S’il y a quelques choses qui changent pour eux, c’est uniquement l’horaire du diner ! Pire encore, ils se servent du jeûne pour justifier leur inaction, leur paresse, leur énervement et leur mauvais comportement envers les autres. La nature du jeûne serait à l’origine de leur défaillance !
Ceux qui penseraient que le jeûne aurait de mauvaises conséquences sur le comportement se trompent énormément. La cause est qu’ils n’ont pris du jeûne que le nom, le considérant comme un acte cultuel mécanique sans âme. Leur jeûne est une habitude et non pas un acte d’adoration. S’ils avaient jeûné poussé par la foi, en espérant la récompense divine, et ayant conscient des finalités du jeûne, ils se seraient réformés, et le jeûne aurait eu un impact considérable sur l’éducation de leurs âmes et la réforme de leur comportement envers les autres. En effet, quiconque jeûne le mois du Ramadan poussé par la foi, en espérant la récompense divine, se rendra compte que les leçons qu’il aura appris du jeûne exigent de lui de faire preuve de bon comportement envers les autres, concrétisant ainsi les propos du Prophète, que la Paix et la Bénédiction de Dieu soient sur lui, « Je n’ai été envoyé que pour accomplir les nobles caractères » (rapporté par Malik).
2- Le Ramadan nous apprend la générosité et la charité. D’après Ibn ‘Abbas, que Dieu l’agrée : « Le Messager de Dieu (que la Paix et la Bénédiction de Dieu soient sur lui) était l’homme le plus généreux. C’était au mois de Ramadan, quand il rencontrait Gabriel, qu’il était le plus généreux. Or Gabriel le rencontrait à chaque nuit de Ramadan où ils étudiaient ensemble le Coran. Quant Gabriel rencontrait le Messager de Dieu (que la Paix et la Bénédiction de Dieu soient sur lui), ce dernier était certainement plus généreux à dispenser le bien que le veut qui souffle sans arrêt» (rapporté par Boukhari et Mouslim).
‘Aïsha, la mère des croyants, que Dieu l’agrée, distribua un jour 180 000 dirhams[1]. Le soir, elle demanda à sa domestique de lui apporter son diner. Celle-ci lui apporta du pain et de l’huile. Oummou Dourra dit alors à ‘Aïsha : « N’aurais-tu pas pu nous acheter un dirham de viande avec tout ce que tu as distribué aujourd’hui ? » ‘Aïsha dit : « Si tu me l’avais rappelé, je l’aurais fait ! » ‘Aïsha, que Dieu l’agrée était si généreuse, qu’elle donnait sans compter au point de s’oublier elle-même !
Ainsi, le mois du Ramadan est le mois de la générosité et de la charité car le jeûneur, ressent en état de jeûne, la souffrance des pauvres et des nécessiteux qui ne trouvent rien pour calmer leur faim. Employons-nous donc, dans ce mois béni, à être au service des plus démunis, dans notre pays, et dans le monde entier. Par ce comportement, le jeûneur se libère de l’avarice et : « Quiconque se prémunit contre sa propre avarice, ceux-là sont ceux qui réussissent » (l’exode : 9). D’autre part, en faisant preuve de générosité envers les pauvres, ils te feront, le soir, des invocations qui t’élèveront auprès de Dieu sans que tu ne le saches. Soyons assidu à ce comportement prenant ainsi le Prophète, que le Paix et la Bénédiction de Dieu soient sur lui, comme exemple. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il appela ce moins : « le mois de la compassion » (rapporté par Ibn Khouzayma)
3- Durant le mois du Ramadan, le jeûneur sincère tient à renforcer les liens de parenté. Dieu a effectivement ordonné de les entretenir et a fait des liens de parenté une voie menant au Paradis. Le Prophète, que la Paix et la Bénédiction de Dieu dit : « Le lien de parenté est accroché au Trône de Dieu en disant : « Celui qui me respecte, Dieu reste lié à lui ! Et quiconque me rompt, Dieu rompt avec lui » » (rapporté par al-Boukhari et Mouslim). Durant ce mois, les visites familiales se multiplient et les membres éloignés d’une même famille se rapprochent. Le mois du Ramadan est le mois des liens : le lien entre l’être et son Seigneur, le lien entre le musulman et le Livre de Dieu, le lien en l’être et les autres et le lien entre l’être et ses proches parents. Pendant ce moi, recherche tes proches, entretiens le lien de parenté avec eux, maintiens le lien avec ceux qui l’ont rompu, pardonne à ceux qui t’ont fait du mal, tels sont les nobles caractères auxquels appelle le Ramadan.
4- Le Ramadan est une occasion d’étudier la science. Pendant ce mois, on ne peut que constater la multitude des cercles d’études et des cours dispensés dans les mosquées : l’étude, la compréhension et la méditation de la religion de Dieu, l’apprentissage du Coran ainsi que les règles de sa récitation … concrétisant ainsi le hadith prophétique : « La quête du savoir est une obligation pour tout musulman ». Quel est donc ta part dans cette quête du savoir durant le Ramadan ? A combien de cours as-tu assisté ? Quel livre as-tu lu ? Combien de versets as-tu appris durant ce mois ? Le Ramadan sera un témoin pour toi ou contre toi dans ta quête du savoir.
5- Le Ramadan apprend au musulman le sens du renoncement « zuhd », et qu’est-ce que le renoncement ? On interrogea l’imam Ahmed : un homme possédant mille dinars (une grande fortune à l’époque), peut-il être « ascète » (zahid) ? Il dit : « Oui ! » « Comment ça ? » lui dit-on. Il dit : « Lorsqu’ils augmentent, il ne se réjouit pas, et lorsqu’ils diminuent, il ne s’attriste pas ». Ainsi, le renoncement n’est pas être dénué de tout bien matériel. Le renoncement est rapport interne avec la matière. C’est que les richesses de ce bas-monde soient entre tes mains, pas dans ton cœur. Ce comportement se manifeste clairement dans le jeûne. En effet, le jeûneur « ascète » se libère, pendant le jeûne, des contraintes matérielles se focalisant sur l’au-delà et se contentant de ce bas-monde de ses besoins alimentaires essentiels. Le jeûneur « ascète » n’est pas celui qui, au moment de la rupture, se jette sur la nourriture avec un appétit d’ogre, garnissant sa table de toutes sortes de nourriture, par pure gourmandise et gaspillage, anéantissant les effets du jeûne acquis durant la journée.
6- Le Ramadan éduque le musulman en lui apprenant la maîtrise de soi. Al-Boukhari et Mouslim rapportent d’après Abou Hourayra, que Dieu l’agrée : « Quand l’un de vous est dans son jour de jeûne, qu’il s’abstienne de dire des grossièretés et d’élever la voix. Si quelqu’un l’injure ou le provoque au combat, qu’il dise : « Je suis en état de jeûne » »
7- Le Ramadan inculque aux musulmans le sentiment de l’union, de la fraternité et de la concorde. En effet, les musulmans du monde entier commencent à jeûner le même jour, et finissent le jeûne le même jour. Ils débutent le jeûne au même moment, à l’aube, et rompent le jeûne au même moment, au coucher du soleil.
Les bienfaits éducatifs du jeûne sont innombrables, nous en avons cité quelques uns. Mais l’objectif suprême du jeûne reste la piété, qui résume en soi tous les autres bienfaits. C’est pour cette raison que Dieu en a fait la finalité du jeûne prescrit à la communauté musulmane en disant : « Ô vous qui avez cru ! On vous a prescrit le jeûne comme on l’a prescrit à ceux d’avant vous, ainsi atteindrez-vous la piété » (2 : 183)
Moncef Zenati
[1] – pour se faire une idée de cette somme, il suffit de savoir que le nisab de la zakat est de 200 dirhams